Neues Österreich (May 3, 1945)
Die rasende Verbrecherbande, an deren Spitze Hitler steht, hat weite Teile Europas in eine Wüstenei, Deutschland in einen riesigen Scherbenberg, in eine grausige Schädelstätte verwandelt. Es ist ein Zusammenbruch von beispiellosen Ausmaßen, eine Hölle, vor der das Herz erstarrt, das Wort verstummt. Aufgestiegen aus den Sümpfen, aus der Unterwelt einer brüchig gewordenen Gesellschaft, hat die „verschworene Gemeinschaft“ verlumpter Agitatoren und krimineller Abenteurer sich eine furchtbare Macht ergaunert - mit Hilfe kriegslüsterner Junker und beutegieriger Industriemagnaten, die für den schändlichsten Raubkrieg aller Zeiten ein Regime der Schande, der Lüge und des Mordes benötigten. Ein Schwindler aus Braunau, ein verkrachter Literat und ein heimtückischer Provokateur konnten nur darum eine Welt in Brand stecken, weil die industriellen und junkerlichen Machthaber Deutschlands ihnen den gesamten Machtapparat auslieferten, weil auch ein lausiger Tunichtgut, an den Schalthebel eines ungeheuren Kraftwerkes gestellt, unermeßlichen Schaden anrichten kann. Die technischen und gesellschaftlichen Energien eines großen Staates des zwanzigsten Jahrhunderts in den unkontrollierten Händen von ein paar apokalyptischen Spitzbuben - das hat die gigantische Katastrophe herbeigeführt.
Und diese Katastrophe, dieses von brennenden Städten durchloderte, vom Millionenschrei der Verzweiflung durchgellte, von Leichendunst durchqualmte Chaos war für die blutbesudelten Spitzbuben nur der Hintergrund für eine Dreigroschenoper mit Wagnermusik. Als schmutzige Possenreißer haben sie ihre Laufbahn begonnen, als schmutzige Possenreißer treten sie nun von der Bühne ihrer zerstörenden Tätigkeit. Es war ein Totentanz der Propaganda, der über den Trümmerhaufen Deutschland hinweglärmte. Unter dem Aufgebot aller verfügbaren Trommelwirbeln, Trauermärsche, Walkürenritt und Götterdämmerungsmotive teilte der deutsche Rundfunk mit, Adolf Hitler sei im Kampfe gefallen und Admiral Dönitz habe die Führung übernommen. Vorher hatte der Reichshenker Himmler mit einem dummen Gaunertrick vergeblich versucht, England und Amerika gegen die Sowjetunion auszuspielen und mit den Methoden eines provinziellen Roßtäuschers die verbündeten Großmächte zu trennen. Nach dem vollkommenen Mißerfolg dieses albernen Manövers verschwand Hitler unbemerkt von der Bildfläche. Der Fluchtplan war längst bis ins Detail ausgearbeitet, die Flugzeuge waren startbereit, die Führer schwangen sich auf und davon. Er werde dem deutschen Volk keine Träne nachweinen, hat Hitler schon vor einem halben Jahr verkündet, das Volk hatte seine Schuldigkeit getan, es hatte sein Blut, seine Lebenskraft für eine Schimäre von „Weltherrschaft“ und Größenwahn vergeudet; für Geopferte hatte Hitler kein Interesse mehr. Der Auftakt vom 9. November 1923 wurde zur schauerlichen Erfüllung gesteigert: auch damals hatte sich Hitler, als seine Gefolgschaft an den Stufen der Feldherrnhalle sterbend zusammenbrach, schleunigst in ein Auto geschwungen, um Hals über Kopf davonzubrausen und später in einer komfortablen Festungshaft einen Sommerurlaub zu verbringen. Diesmal vollzog sich dasselbe in phantastischer Inszenierung: die Karikatur einer Wagneroper im Scheinwerferlicht des verbrennenden Deutschen Reiches, mit Trommelwirbeln von Millionen Gerippen auf der zerfetzten, blutdampfenden Erde, die einst für das deutsche Volk eine Heimat war und jetzt eine Hölle ist.
Der letzte Propagandatrick, das Märchen von Hitlers „Heldentod,“ soll dazu dienen, die letzten verendenden deutschen Divisionen noch einmal zu „bedingungslosem Einsatz“ aufzustacheln, noch einmal eine sich selbstzerfleischende Nation „zum Sterben zu berauschen“ und den Boden für eine Fortsetzung der verbrecherischen Tätigkeit auch nach der totalen Niederlage vorzubereiten, den Boden für die künftige Entfesselung eines dritten deutschen Wahnsinnskrieges. Es soll den gerissenen Propagandisten nicht gelingen, durch ihre letzte und frechste Lüge den Blick der Schlachtopfer zu vernebeln. Es soll ihnen nicht gelingen, durch eine grelle „nordische List“ der strafenden Gerechtigkeit zu entrinnen. Es soll ihnen nicht gelingen, den Fluch der Menschheit und auch den Fluch des mißbrauchten, von Schlachtbank zu Schlachtbank geschleiften deutschen Volkes auszulöschen.
Unter den Leichen von Berlin hat niemand den verschollenen Hitler gefunden. Die Richter werden ihn finden - und möge er sich im letzten Winkel der Welt verstecken.
Paris-presse (May 3, 1945)
LA MORT DE HITLER
Doenitz, chef du IIIe Reich ; Ribbentrop s’en va
Les Alliés exigeront dès la cessation des hostilités que le corps du Führer soit présenté pour établir avec certitude qu’il ne s’agit pas d’un subterfuge
LONDRES, 2 mai. - La radio du nord de l’Allemagne a annoncé, hier soir, que Hitler était mort dans l’après-midi, à Berlin, à la Chancellerie.
– Lundi dernier, ajoutait le speaker, Hitler avait choisi l’amiral Doenitz comme successeur.
Après cette déclaration, Doenitz a pris lui-même la parole à la radio :
– Le Führer, déclara-t-il, est mort à son poste de commandement…
Et, afin de tenter une ultime manœuvre pour diviser les Alliés il indiqua dans sa proclamation que son seul but était de défendre l’Allemagne contre les armées russes.
– Nous serons forcés, ajouta-t-il, de mener une lutte défensive contre les Britanniques et les Américains aussi longtemps qu’ils nous empêcheront de lutter contre le bolchevisme.
L’annonce de la mort de Hitler fut précédée à la radio de Hambourg par de la musique wagnérienne et, en particulier, par le « Crépuscule des Dieux ».
Pendant ce temps, la radio du sud de l’Allemagne donnait de la musique légère.
– La façon dont on annonce la mort de Hitler pour faire croire qu’il est mort au combat est le premier acte de la légende du Führer, a déclaré lord Vansittart à un collaborateur de l’agence Reuter.
« Il y a quelque temps, Himmler nous disait que Hitler était malade et ne vivrait pas plus de 48 heures.
« Hitler qui, nous dit-on, souffrait d’une hémorragie cérébrale, s’est-il levé de son lit de souffrances pour mourir en héros ? »
Londres croit à la mort…
LONDRES, 2 mai. - Dans les milieux diplomatiques de Londres, on admet officiellement la mort de Hitler, mais l’on précise qu’à la cessation des hostilités les Alliés demanderont à voir son cadavre ou d’autres preuves tangibles de sa mort, pour établir avec certitude que cette « vivante torche de guerre » ne se cache pas dans quelque coin perdu de l’Allemagne, attendant son heure.
On souligne que les bruits relatifs à la mort de Hitler ont commencé à circuler il y a huit jours, et que c’est alors qu’elle a probablement eu lieu. La cause en reste encore à établir - embolie, blessure de guerre ou assassinat - mais il est évident que les dirigeants nazis ont décidé alors d’en profiter pour la propagande du nazisme, et jamais celle-ci n’avait atteint un tel degré de mysticisme patriotique qu’au cours de la semaine passée. La radio allemande a commencé, en effet, à rapporter que Hitler se trouvait à la tête de ses troupes d’élite défendant Berlin, et il était devenu évident qu’il devait partager le sort de sa capitale, dont la situation était déjà désespérée.
En somme, cette mort est survenue au moment précis où elle devait survenir pour le grand bien du nazisme : elle fait de Hitler un véritable martyr de son idéal une espèce de « saint Adolf » nazi, que les générations futures pourront adorer à l’égal d’une divinité. - (U.P.)
Le président Truman a le sourire…
WASHINGTON, 2 mai. – Le correspondant de l’agence Reuter à Washington déclare que le président Truman a appris la mort de Hitler alors qu’il était en conférence avec le général Marshall, chef d’état-major de l’armée des Etats-Unis.
Un quart d’heure après, le visage souriant, il quittait la Maison Blanche.
Cette nouvelle est généralement accueillie avec scepticisme. L’opinion des milieux militaires, traduite par un porte-parole du département de la Guerre, est que cet événement enlève à l’offre de capitulation de Himmler la dernière chance qu’elle pût être étendue à l’URSS.
Un subterfuge dit Moscou
MOSCOU, 2 mai. - La radio soviétique suggère ce matin que l’annonce de la mort de Hitler peut être un subterfuge qui lui permettrait de disparaitre de la scène pour entreprendre une lutte souterraine.
Von Ribbentrop liquidé
LONDRES - La radio de Hambourg annonce que le comte Schwerin von Krossigck vient d’être nommé ministre des Affaires étrangères.
Hitler aurait été assassiné
par Yves DELBARS
La vision d’une mort à grand spectacle avait toujours hanté Hitler, grand organisateur des manifestations qui représentaient une des principales armes de sa propagande. Fidèles à ce principe, ses collaborateurs immédiats s’efforcent encore de parer sa mort d’une auréole de légende.
Les motifs de l’offre de capitulation de Himmler, précédée elle-même de l’annonce de la démission de Goering avaient fortement intrigué l’opinion.
D’autant plus qu’à peine 48 heures avant, lors de son discours a l’occasion du 56e anniversaire de Hitler, Goebbels avait une nouvelle fois proclamé que le IIIe Reich ne capitulerait jamais. Les efforts pour expliquer le mystère de ce revirement soudain - la catastrophe militaire s’était précisée bien avant - ont donné naissance à de nombreuses hypothèses plus ou moins vagues. Toutes cependant aboutissaient à la disparition de Hitler comme Führer effectif.
Une version de cette disparition a été donnée par les milieux habituellement les milieux informés. Selon elle, Hitler a été assassiné. Et les auteurs de l’attentat se trouvent dans son entourage immédiat.
La casemate BX
Le 21 avril, au grand quartier général situé dans la forteresse souterraine du Tiergarten, désignée comme casemate BX, Hitler avait présidé un conseil de guerre auquel assistaient, entre autres, le maréchal von Kesselring, le maréchal Busch, les généraux Schoerner, Guderian, Fitzler et le trio Himmler-Goering-Goebbels, accompagné de Bohrmann, successeur de Rudolf Hess.
Hitler continuait à insister avec véhémence sur le plan auquel il s’accrochait depuis des mois : continuer la lutte dans les réduits bavarois, danois et norvégien, même après la chute prochaine de Berlin. Seul, Goebbels aurait partagé son avis. La séance se termina dans une atmosphère tellement tendue que l’invitation a Kesselring, Busch, Himmler et Goering de revenir seuls le lendemain matin les remplit d’appréhension. Le souvenir du 30 juin 1934 et de l’hécatombe de ceux qui avaient osé s’opposer a la volonté de Hitler n’était pas effacé.
Dans la nuit, quelques heures avant la réunion redoutée, une explosion d’une grande violence se serait produite dans les locaux privés de Hitler dans la casemate BX. Lui-même et tous les gardes de corps de service devaient y succomber.
Tôt dans la matinée, d’après les mêmes informateurs, Himmler, qui depuis l’hiver 1941-1942 avait remplacé Goering comme successeur de Hitler, serait intervenu. Il aurait insisté pour que le secret de la mort fût gardé afin de gagner du temps et pouvoir en tirer le profit escompté. Il prenait sur lui d’engager des pourparlers en proposant une reddition « sans conditions » aux armées américaines et anglaises. Les maréchaux commandant les tronçons nord et sud reçurent le conseil de rejoindre leurs troupes : et Goering fut envoyé en Norvège. Les complices de Hitler voulurent prouver que leur offre de capitulation avait une valeur pratique. Pour cela, il fallait que la résistance se prolongeât encore et si la capitulation était acceptée, son efficacité fût prouvée en persuadant les S.S. fanatisés d’accepter de mettre bas les armes.
Goering était chargé de la mission en Norvège pour pouvoir s’échapper le cas échéant en Suède, tandis que Himmler lui-même allait se consacrer au désarmement des troupes occupant le Danemark.
Le 22 avril, sur ordre de Himmler, la casemate BX fut entièrement détruite par des charges massives d’explosif, sous prétexte qu’endommagée par l’explosion précédente, elle présentait un danger d’écroulement.
En recourant a cette mise en scène, les militaires ne font que suivre la tactique traditionnelle allemande : essayer de brouiller les cartes.
Quant à Goering et Himmler, ils font une ultime tentative pour se faire « dédouaner » ou au moins de sauver leur vie. - Y. D.
COMMENTAIRES AMÉRICAINS
« Personne ne connaît la vérité »
dit un grand journal de New-York
À Washington, M. Johnson, sénateur démocrate du Colorado, a déclaré : « J’espère que la nouvelle de cette mort est exacte, mais je préfèrerais voir le cadavre avant que d’y croire. »
Quant à M. Taft, sénateur républicain, il a dit :
« Si cette nouvelle se confirme, il est intéressant de noter que la mort de Hitler vient en même temps que la faillite complète de sa doctrine. »
Le New York Times écrit :
« Qu’elle soit exacte ou non, cette nouvelle marque la fin de Hitler et celle de son régime, qui a plongé le monde entier dans la guerre. Il semble, d’ailleurs, n’y avoir aucune raison de douter de cette mort. »
Le New York Herald Tribune estime que personne ne connaît la vérité :
« Hitler meurt entouré de mensonge aussi bien que de saleté. Perdu derrière un nuage de fausseté, écrit-il, il a peut-être été tué au combat ou est mort en dément et il est même possible qu’il ne soit pas mort. »